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samedi 9 janvier 2010

The Necks "Silverwater" 2009

Petite présentation! The Necks est un groupe australien, culte, comprenant 3 mecs, 1 néo-zélandais (Chris Abrahams au piano) et 2 Sydneysiens (Tony Buck à la batterie et Lloyd Swanton à la contrebasse). Tous les trois ont participé à moult projets, Tony Buck semblant être le plus proche de la galaxie punk/rock au regard de ses collaborations: John Zorn, Tom Cora, The EX, Kletka Red, Ground Zero,etc,... Et il a même formé le groupe Peril dans les années 90 au Japon avec les maîtres noiseux Otomo Yoshihide et Kato Hideki. Le premier disque de The Necks, "Sex" parait en 1989 et pose les bases d'une formule qui ne changera que très peu: 3 mecs issus du jazz déroulent, souvent sur une plage d'à peu près 1h, une impro jazz/ambient un peu bâtarde, mêlée à des éléments issus d'autres courant musicaux. Une formule qui à l'écoute sonne très classique, direct descendants minimalistes d'un Henry Cow (groupe jazz rock 70's de Fred Frith) planant. Le "Silverwater", leur dernier disque en date, est dans le même genre que les 14 autres disques...mais il semble que depuis leurs débuts, les influences extérieures au jazz se font de plus en plus fortes. Ici, en fait, il est même difficiles de parler uniquement d'un disque de jazz. Ok, il reste le format impro, les instruments caractéristiques, et quelques passages "typiques"...mais au fond, si tu veux ranger ça dans un truc, c'est bien plus dans ce qu'on appelle post-rock.... Oh My God!!! Ça me fait bien mal de qualifier un bon disque de cette appellation galvaudée par des millions de groupes de merde, depuis que Mogwai a rendu la recette hyper efficace. Putain du post-rock!?! Merde ce terme renvoie tellement à une esthétique à zéro créativité, qu'il est difficile de se souvenir les bons disques auxquels il renvoyait d'abord dans les années 90...

Non, ce très très chouette "Silverwater" renvoie au bon post-rock, voir même à ce que beaucoup considèrent comme l'album fondateur de ce sous-genre, le "Laughing Stock" de Talk Talk, album SUBLIME (et improbable vu ce que faisait le groupe quelques années auparavant...) paru en 1991. Bon on n'en atteint tout de même pas les hauteurs vertigineuses, faut pas non plus déconner... (déconner = enlever sa bite du con!!! dingue!!!) L'unique piste du disque est une lente évolution progressive qui passe par divers stade, bien différents les uns des autres, mais au final l'unité est clairement préservée! (bah oui 15 ans d'expériences les mecs aussi...)
On débute par un mystère lunaire très impro/musique concrète qui peut en rebuter certains par son minimalisme, mais on pose juste l'ambiance, sans se presser. Moi ça me parait indispensable de poser une base bien profonde pour pouvoir ensuite encaisser un morceau d'une heure... Si t'es pas dans le truc, tu te fais chier, point barre. Là, au gré d'ambient extra-terrestre, de grincements minéraux et cristallins, de cliquetis insectoïdes et de cloche mystérieuse, quelque chose prend vie, et cette chose est incarnée par les 3 musiciens qui amènent ensuite des sonorités plus organiques. A 13 min, focale sur la bête: elle s'éveille lentement et la batterie a beau répéter son roulement spectaculaire, l'animal est plus sûrement une grosse vache feignasse, au vu de la contrebasse simple, lourde et métronomique. J'imagine bien un gros animal lent au regard lourd et mélancolique, une puissance qui se met en route. Mais en fait, tout devient plus aérien... Est-ce que la vache est entrain de s'envoler? Euhh...laissons de côté les métaphores en fait.
En tout cas, le morceau continuera d'évoluer dans des sphères planantes jusqu'à la fin. Le jazz est toujours présent, via les instruments, les légères notes de piano, la contrebasse qui lâche des "POMMMMM....." de temps à autres et la batterie casi absente. Moi, ça me renvoie en fait à toute cette électro ambient/intello des années 90, dont les fers de lance ont été Oval, Autechre, Jim O'Rourke ou encore Fennesz. Cette influence me semble vraiment très forte avec même quelques tressautements glitchiens tout du long. La guitare qui arrive à 30 min n'est pas ce que je préfère dans ce disque... Son motif n'est peut-être pas assez pur? Un poil lourd? ou simple? Qu'importe, faut pas exagérer non plus ça reste excellent et c'est à ce moment que l'on arrive dans une plus pure tradition post-rock, nappé de Brian Eno / Klaus Schulze. A 40 min, ça s'assombrit (sans doute que la vache qui vole tombe sur un orage...). Une grêle de piano suspend le temps et un divin duo contrebasse/batterie chaotique passe et repasse. C'est un de mes passages préférés!! Sacré ambiance! Et ça n'est pas tiède un seul instant! Ah et putain cette guitare planante qui arrive, style coucher de soleil estival si cher à Christian Fennesz... Superbe!!! Un clair obscure très émouvant. A 48 mn 30, re-temps suspendu! Et là on pourrait très bien être entrain d'écouter une sortie Raster-Noton, label électro minimaliste assez radical, très à la mode depuis 2 ou 3 ans. La fin du disque arrive... Et elle sera superbe. Toujours très simplement... Ça met en valeur l'essentiel. Les notes de piano qui closent le disque sont casi bouleversantes. The Necks, ou comment redonner ses lettres de noblesses à un genre qu'on ne pouvait plus blairer depuis 10 ans.

vendredi 11 décembre 2009

Scul Hazzards "Landlord" 2009

Ce "Landlord" est déjà le second album du groupe australien Scul Hazzards. Le premier, "Let Them Sink", paru l'année dernière, figurait parmi mes disques préférés de l'année 2008. La même année j'ai eu la chance de les voir en concert sur 2 dates et à chaque fois c'était phénoménal! Un trio rock guitare/basse/batterie classique qui t'envoie des morceaux sombres et tendus, mus par une colère rentrée. A chaque fois, la même (jouissive) rengaine: la dame, chaude comme la braise, derrière la basse, fait claquer tranquillement ces LOOUUURRRDES cordes... Le batteur applique la même façon à son instrument: un martèlement qui prend son temps et inéluctablement avance sur un chemin qu'on imagine pas rassurant du tout. Mais la menace n'est pas plus ce chemin que le groupe lui-même: le chant sauvage et enragé du guitariste en est la preuve, Scul Hazzards est un animal de guerre qui tranche, arrache et découpe, même si c'est de la manière la plus chirurgicale qui soit. Et ça leur plaît: il faut voir la bassiste en concert, onduler et jouir des brutales torgnoles (mmhhh super nom de groupe ça non??!) qu'elle nous inflige. Hyper sexe. Leur musique l'est aussi, impitoyable prédation dont le seule but serait de s'épanouir du massacre perpétué. Ca, c'était 2008... Et 2009? Quid du "Landlord" en question?

Comme son prédécesseur, il est paru grâce à la coalition de plusieurs labels français; putain de réussites pour eux, bravo! Pour le "Let Them Sink", Rejuvenation, Slow Death, Who's Brain, Les Disques Du Hangar 221 et Shot Down ont participé. Pour "Landlord", les mêmes mais Slow Death remplacé par Bigoût.
Je vais éviter de tourner autour du pot: ce disque est pour moi un indispensable noise/rock, ni plus ni moins. Qu'importe si la formule appliquée rappelle énormément (trop diront certains) la Chicago's touch, Shellac, Big'N (quand ce groupe sera-t-il reconnu à sa juste (énorme) valeur???)..., qu'importe si ça arrive 15 ans après, le groupe atteint ici une épure dingue!!! Il ne reste que l'essentiel, zéro artifice, une formule casi-minimaliste. Exactement dans le même registre "j'enrage donc je jouis" que le disque précédent, mais moins de gras, un décharnement extrême qui permet une mise en avant de chaque instrument, tous en même temps, dans une lecture simple, avec une attitude casi rentre-dedans. C'est impressionnant de voir ces morceaux défiler, aux rythmiques implacables et hyper maîtrisées, qui servent d'appui à la basse toujours aussi dinguement surtendue et à la guitare écorchée et rêche. On pense aussi à Rapeman. Les 5 premiers morceaux sont 5 tubes incroyables!!! La formule est pourtant tellement classique et connue!!!! Ces trois là sont définitivement hyper talentueux! Pas le talent démonstratif qui t'en met plein la gueule en un minimum de temps, mais un talent qui ne cherche pas à prouver quoique ce soit... Un talent sans doute aussi facilité dans son expression par une harmonie parfaite entre les 3 barjos.
Et en découle donc une évidence que l'on traiterait de racoleuse pour d'autres, moins honnêtes et/ou moins doués. Chaque titre est d'un même bloc, contrairement au premier disque qui permettait quelques breaks, ruptures harmoniques et autres "enrichissements" dont on se passe maintenant sans problème. D'aucun reprocheront à Scul Hazzards cette simplicité que je qualifie d'épure, en y voyant une perte de richesse à travers cette perte de matière. Je pense a contrario qu'il y a une volonté d'approfondissement en se centrant sur un motif instrumental, en le soulignant, en tournant autour et en faisant de lui la star de chaque morceau, si basique et sobre soit-il. Ah nom de dieu, ce putain de "Suburbs" sur la fin de l'album, et ses roulements de mécaniques, l'emballement de la batterie qui envoie rebondir dans tous les coins la basse folle et la guitare acérée et stridente qui fait saigner les oreilles...quel putain de pied!!!
Il faut absolument, par ailleurs, voir ce groupe en concert. C'est à chaque fois hyper organique et puissant (hyper sexuel et méchant??) et difficile de ne pas tomber amoureux des 3 bestioles sur scènes. Quelques exemples ici, ici, , , ou encore et ici pour une reprise du Kerosene de Big Black. Je ne comprends pas comment il est possible que ce groupe passe encore autant inaperçu!!! On me souffle à l'oreille qu'il faut que je case "un des secrets les mieux gardés du noise-rock contemporain"... Ok c'est fait et c'est tout à fait ça.

dimanche 8 novembre 2009

Rowland S. Howard "Pop Crimes" 2009

Oh merde, quel disque... Sérieusement, comment ne pas être séduit par ce mec? Cette gueule androgyne, ce physique hallucinant... Son jeu de guitare option blues du sud qui te transperce le ventre, ses différents projets musicaux à commencer évidemment par The Birthday Party... J'adore ce type... J'adore son nouveau disque "Pop Crimes"...
On a croisé l'australien dans d'autres projets, These Immortal Souls et Crime And the City Solution notamment et en 1999, il avait sorti son premier disque en solo, "Teenage Snuff Film" où il nous livrait un blues-rock gothique sombre, très enraciné dans un essentiel folklore américain. 10 ans se sont écoulés depuis, durant lesquels il n'est apparu que sur un single avec le groupe The Devastations. Il faut aussi dire que Rowland S. Howard est gravement malade, et l'enregistrement de son nouveau disque a dû être accéléré de peur qu'il reste à jamais non-fini, dixit lui-même dans un récent entretien. Et ça fout les boules.
Quand j'ai lancé le disque, j'ai immédiatement fondu... Pas en larmes mais ça aurait pu... Les 2 premiers morceaux sont sublimes, 2 ballades tristes, entre lumière et ombres, aux mélodies parfaites, évidentes et c'est réellement bouleversant. D'emblée, le disque t'attaque d'un double direct aux tripes.

Le premier morceau, "(I Know) A Girl Called Jonny" est un duo avec Jonnine Standish. Cette gonzesse chante dans Htrk, groupe d'origine australienne qui a sorti un disque cette année aussi. Bon disque par ailleurs! Avec un sommet, "Fascinator", que j'ai beaucoup écouté. Ici, elle offre à Rowland S. Howard sa plus belle voix grave, un truc dingue de sensualité déprimée. Elle a définitivement un truc fort cette Jonnine... Et la voix qui lui répond est profonde et sombre et nous tiendra tout le long de l'album; une voix de crooner gothique romantique que tu suivras sans te poser aucune question.
Et qui revient donc dès le morceau suivant "Shut Me Down", qui est la reprise d'un morceau déjà paru sur une réédition vinyl de son premier album, en 2001. Le nouveau disque est bien plus épuré que le précédent d'ailleurs, et finalement la première version de ce morceau qui fait le lien entre les deux, annonçait déjà ce cap vers quelque chose de plus essentiel car il était bien plus posé et décharné que les autres. Dans le même ordre d'idée, Rowland précise qu'il a aimé par exemple le choix du disque à 8 morceaux, hommage aux années 80 durant lesquelles les sorties vinyle à 4 titres par face étaient une sorte de schéma classique. Et retour à l'essentiel à travers le blues aussi, car ce disque est avant tout marqué de ce sceau, essence du rock et de bien plus. Cette nouvelle version de "Shut Me Down" est casi identique, mais moins terrienne, un violon rend la chose plus planante et le tempo est ralenti. La voix est pourtant encore plus grave, plus profonde. Le songwriter dans toute son oeuvre, il laisse respirer sa mélodie et elle devient encore plus touchante... Un peu à la manière d'un Bill Callahan, qui n'hésite pas à frôler un non-spectaculaire le plus complet pour mettre en valeur la seule matière vivante restant. Ce morceau me transforme en putain de chochotte, c'est irrésistible... A chaque fois qu'il prononce la sentence "you shut me down", je suis submergé d'émotion.
Le titre suivant est une reprise de Talk Talk, un tube à l'époque, "Life's what you make it", paru sur "The colour of Spring", l'album qui les a lancés vers les cimes ultimes atteintes quelques années après, à travers leur génial "Laughing Stock". En ce qui me concerne, c'est surtout l'occasion de me reposer et de me préparer pour un des temps forts de l'album, le titre qui donne son nom au disque: "Pop Crimes".
Enorme basse qui répète son schéma durant plus de 7 minutes, alors qu'un blues de guitare va et vient, enveloppant Howard qui se transforme pour tout le reste du disque en cowboy gothique. Et c'est donc logiquement qu'on le retrouve juste après à reprendre Townes Van Zandt, superbe interprète country/folk/blues dont les premiers disques remontent à la fin des années 60. Le morceau "Nothin'" était un country blues très noir d'un sublime incomparable qui se terminait ainsi:

Sorrow and solitude
These are the precious things
And the only words
That are worth rememberin'

Exactement la tonalité qui colle à la peau de Howard; il en fait une marche funèbre plus lourde, qui n'égale pas pour moi la version de Van Zandt, mais il pousse le blues du morceau en avant et en sort une version plus outrée, plus effrayante mais sans doutes moins émouvante. "Wayward man" suit, excellent aussi, avec une superbe batterie autoritaire, Mick Harvey avec qui il jouait dans The Birthday Party, et c'est vraiment le morceau qui renvoie le plus à ces débuts, avec même un cuivre barjot. Après avoir (très bien) fait son Leonard Cohen sur l'avant dernière piste, le cowboy remonte sur son cheval et s'en va sur un dernier morceau qui clos le disque comme un générique de fin de film, montrant le héros s'en allant vers de nouvelles aventures... J'espère en effet, putain de merde, qu'il y en aura d'autres... En attendant, celle-là donne lieu à un très très très très bon disque!